Les Échos du Logement n°124

41 JEAN-MICHEL DEGRAEVE LE « FOYER » DES HABITATIONS À BON MARCHÉ d’un sas d’air (G). La laverie (F) est équipée d’un évier, d’un bac de douche pour les soins cor- porels et d’une lessiveuse à eau bouillante ou «douche à cuire le linge». Le WC (H) au-dessus de la fosse d’aisances est placé à l’arrière de l’habitation. L’étage comprend trois chambres à cou- cher (K). Sur lemur entre la salle com- mune et la laverie, un corps de cheminée central permet d’uti- liser un seul poêle afin d’écono- miser le combustible et la main d’oeuvre. Outre le poêle principal, le corps de cheminée permet de raccorder la lessiveuse de la la- verie. Il comprend également les conduits d’aération nécessaires à l’évacuation des odeurs de cui- sine et des vapeurs de la laverie. La réserve à charbon sous l’es- calier est alimentée depuis l’exté- rieur et accessible depuis la salle commune. Le foyer devient ainsi «  le coeur du home qui chauffera la maison pendant l’hiver, sera aussi la source de chaleur pour la cuisson des aliments. Là ou se fera la cuisine, sera le foyer. Autour du foyer, se réunira la fa- mille »  2 . L’incorporation des lo- caux techniques dans le volume habité améliore les circulations et supprime les coûteuses caves. Cette organisation facilite les taches quotidiennes et permet à l’épouse/ménagère de partici- per à la vie de famille sans être «  la servante des siens ». La che- minée est étudiée avec attention car elle est considérée comme le «moteur de la machine foyer ». Son implantation centrale limite la hauteur des souches de che- minée et facilite le tirage. Son exécution est soignée, avec des parois rendues étanches par un enduit lisse ou l’utilisation de boisseaux. Son débouché supé- rieur se termine par un simple mitron. Des équipements techniques performants L’efficacité du poêle à charbon traditionnel est jugée primitive : production de chaleur variant selon le chargement, chaleur excessive à proximité, pas d’eau chaude disponible en perma- 2 Le Programme de l’Habitation à bon marché, L’Habitation à Bon Marché, juin 1921, première année, n°6, p130. nence, rendement faible,… Des systèmes innovants de pro- duction de chaleur sont expé- rimentés : foyer à pot bouilleur, poêle-chaudière bordelais ou poêle russe. Les principes de ce dernier système sont détaillés dans les premiers numéros de la revue L’Habitation à Bon Mar- ché. Le poêle russe est composé d’un massif de maçonnerie avec des conduits de circulation des gaz brûlés permettant de cap- ter toute la chaleur avant leur sortie en toiture. Au centre de la maison, une succession de conduits au départ du fourneau de cuisine chauffe la salle com- mune et adoucit la température des chambres à l’étage. Des ori- fices hermétiques – portes du foyer et du cendrier, registres de nettoyage et de réglage – assurent une combustion lente et une bonne circulation des gaz brûlés. Un serpentin d’eau encastré produit l’eau chaude qui est stockée par gravitation en partie haute du foyer. Cette solution préserve la maçonnerie de la surchauffe et donne de l’eau chaude en continu. Ce système de chauffage à accumulation ne va cependant pas se généraliser, probablement vu la nécessité d’un approvisionnement régulier en combustible et le manque de souplesse face aux rapides va- riations de température de notre climat tempéré. Le poêle en fonte est lui préféré, mais couplé à un système de récupération de cha- leur des gaz brûlés sur lemodèle du poêle russe. A.Puissant teste à Couillet un poêle à charbon avec récupération des calories chauffant d’autres locaux. Une recherche à poursuivre… Aujourd’hui, nos chaudières fonctionnent sans approvision- nement humain, les plaques de cuisson sont pilotées à dis- tance et l’eau chaude disponible à volonté. Cette recherche de l’adéquation entre équipement énergétique et conception du logement des premières habita- tions à bonmarché est loin de nos pratiques actuelles. Les tech- niques de production de chaleur ont fortement évolué durant le XX e siècle. A partir des années 1960, le gaz, le mazout et l’élec- tricité détrônent le charbon. Les années 1980 voient l’utilisation de l’énergie solaire et de pompes à chaleur et les nouveaux loge- ments passifs actuels ne récla- ment quasi plus de chauffage. La place d’un foyer dans le logement a donc perdu de son importance. Dans la phase actuelle de transi- tion énergétique, la question du logement comme source d’éner- gie impose une approche trans- versale des liens entre énergie et durabilité. Seule constante depuis les habitations à bonmar- ché, la recherche de la solution énergétique la plus adéquate pour les ménages démunis est à poursuivre ! � � Façade avant d’une maison de Couillet © Jean-Michel Degraeve

RkJQdWJsaXNoZXIy MTc4MDMy